Webb avait expressément demandé aux membres du projet Troy d’enquêter sur les obstacles techniques aux campagnes d’information américaines, en particulier sur les moyens de contourner le brouillage par l’Union soviétique du brouillage d’émissions Voice of America. Ce groupe ambitieux a toutefois interprété son mandat de manière beaucoup plus large en produisant un rapport de 81 pages (plus des annexes) sur tous les aspects imaginables de la guerre politique. Outre les chapitres attendus sur les transmissions radio et l’utilisation de ballons à longue distance, le rapport du groupe d’étude de février 1951 traitait de sujets aussi divers que la préparation à la mort de Staline et les stratégies de débriefing des transfuges soviétiques. Le département d’Etat n’a pas été impressionné et Nitze a souligné que le groupe « dépassait de loin son mandat d’origine et explorait un domaine pour lequel il n’avait aucune compétence particulière et sur lequel il disposait de peu d’informations ». Le plus gros impact du projet Troy s’est finalement révélé être des relations durables entre les responsables gouvernementaux du département d’Etat et la CIA et des spécialistes des sciences sociales du MIT et de Harvard. Dans un avenir plus immédiat, cependant, l’approbation par le Projet Troy d’une sorte d’organisme central chargé de coordonner les divers programmes de guerre psychologique, déclarés et dissimulés, déjà en place, a eu des répercussions sur l’établissement de la politique étrangère. En dépit de leurs autorisations très secrètes, les membres du projet Troy n’ont pas accès aux informations ni même à la confirmation de l’existence de certains des programmes clandestins du CPVP. Mais même en l’absence de ces détails, ils ont compris qu’il était évident qu’avoir autant d’agences gouvernementales impliquées dans la propagande risquait de faire double emploi, d’objectifs contradictoires et de fausses couvertures. Le Département d’État disposait bien entendu de ses programmes d’information, mais il en était de même de l’Administration de la coopération économique (agence chargée de la mise en œuvre du plan Marshall), de l’Armée de terre et de l’OTAN. La CIA, l’Administration de la coopération économique et l’armée ont également mis en place des programmes d’information secrets. En Corée, le théâtre commandant des opérations de guerre psychologique contrôlée. Aucun de ces programmes n’était coordonné avec les autres.